lundi 17 février 2014

Du féminisme au Femen-isme

Le 10 février dernier, le député du Rhône et président du groupe d'études sur les sectes à l'Assemblée nationale, Georges Fenech (UMP), a saisi la Miviludes (Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires) en vue de prononcer la dissolution du groupe d'activistes « féministes »: Femen, écueil au sein duquel échouent tant de personnalités sans relief. Louable initiative face à l'inaction et la complicité tacite du gouvernement. Intolérance, christianophobie, antisémitisme, islamophobie, autant de termes pour qualifier un mouvement dont les actions et la médiatisation exaspèrent et heurtent les consciences de nos concitoyens. Depuis plus d'un an déjà ce mouvement, d'origine ukrainienne, ne cesse de se radicaliser (contestation de l'ordre social, discours haineux, profanation du patrimoine, menaces, cocktail molotov lancé contre l'ambassade russe à Berlin), innovant toujours plus dans la provocation. Des saluts nazis à l'avortement de Jésus sur l'autel de l'église de La Madeleine à Paris, le mouvement ne peut plus désormais rester impuni. 
Que faut-il retenir de toutes ces gesticulations méticuleusement orchestrées? En tout état de cause, le contraire de ce qu'elles prétendent défendre. En manifestant seins nus, exhibant ainsi leurs corps couverts d'inscriptions subversives, elles dégradent l'image de la femme. En profanant des lieux de culte, où règnent d'ordinaire la paix et l'harmonie, elles incitent à la haine et à l'intolérance. En se considérant comme des « salopes », elles humilient la femme et décrédibilisent le féminisme intellectuel et socialement acceptable. Certes on m'opposera les coups d'éclat des suffragettes sous la IIIe République ou bien encore les actions coup de poing des militantes du MLF. Mais oserais-je vous rétorquer que derrière ces actions, il y avait tout de même un programme politique solide et une philosophie qui avait du sens. Autant dire que chez les Femens leur discours est loin d'être aussi éclatant que leurs actions. Et c'est peu dire...L'une d'elles regrettait récemment, dans une interview pour le journal Libération, édition du 7 mars 2013, qu'il fallait, en France, publier des livres pour être reconnu et légitime. Eh oui, l'art de maîtriser la plume n'est pas donné à tous. 
Que dénoncent-elles? Le système patriarcal, la réduction de la femme à leur seul corps, la négation de leurs compétences intellectuelles et professionnelles, le règne des critères de beauté, qui engendrent l'ostracisme de celles qui ne daignent se complaire aux regards masculins. Certes ce sont des réalités. Mais comment le dénoncent-elles? Par la nudité, « car c'est la seule façon de les provoquer [ndlr: les hommes], d'obtenir leur attention » (Inna Shevchenko au Guardian, édition du 22 septembre 2012). Un mouvement féministe qui se soumet à la domination masculine, appelant à la perversité plus qu'à l'intellectualité, cela relève d'un concept bien particulier qui me laisse toujours pantois. 
Un tel exemple de médiocrité aurait pu prêter à sourire si la situation n'était pas aussi alarmante. Avant toute chose, que dire à ces milliers de femmes qui militent activement, certes habillées, certes sans mise en scène, certes sans violence, mais avec leur cerveau et non leur corps, avec raison et non passion? Elles se heurtent à l'invisibilité sociale que dénoncent tant les Femens. Et quand les journalistes consentent à leur accorder une interview, c'est pour leur demander ce qu'elles pensent de ce mouvement. Ils l'entretiennent, à leur insu (?), en braquant leurs objectifs sur ces corps, encore juvéniles, déformés par la haine, en portant leur attention sur ces femmes qui érigent l'intolérance en combat. Cela aurait pu prêter à sourire, dis-je, si le mouvement n'avait pas flirté avec les dangers de l'extrémisme, devrait-on dire du « sextrémisme », et du sectarisme. Sur ce point, Le Figaro, dans son édition du 12 février 2014 , nous livre un témoignage ô combien instructif d'une ex-Femen, Alice, dénonçant « l'emprise, le lissage de la pensée, la reconfiguration mentale » des activistes. Après un an et demi passait aux côtés des Femens, cette trentenaire, reconnaît l'autoritarisme sous-jacent au mouvement: négation de l'individu, « transformation du corps et de l'esprit », soumission, humiliation des « recrues » de la part des « chefs de bandes » ... le fascisme n'avait pas mieux fait en son temps. Mais le plus préoccupant sans doute, dans un monde où la médiatisation est reine et la provocation loi, est de voir à quel le point le scandale est utile, sinon nécessaire, pour attirer l'attention, porter un combat ou défendre une cause. 
Malgré la complaisance de certains médias, le soutien sans faille de journalistes, se revendiquant féministe, le financement opaque de leurs activités et l'inaction des autorités, les Femens agacent et s'attirent désormais l'hostilité virulente des milieux intellectuels et politiques. S'estimant investies d'un message universel (sic), elles prétendent dicter aux femmes leurs conduites dans l'impudence et la médiocrité qui est la leur mais la justice risque bien, dans quelques jours, de les ramener rapidement sur terre.

Quentin Bouclet

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